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Roman francophone - Page 7

  • L'homme à la carabine. - Patrick Pecherot (Gallimard, 2011)

    1410250109.jpgDans les années 1910, la bande à Bonnet fait beaucoup parler d'elle. Parmi ses membres, André Soudy est le plus jeune. Malingre, tubard, émotif, c'est celui qui tenait la carabine sur la photo..

    L'auteur a souhaité évoquer la bande à Bonnot en parlant plus précisément de Soudy. Texte libre, extraits de journaux et d'audience, références à des écrivains qui ont publié sur le sujet (Aragon, Colette, Boris Vian,...). Cet essai n'est ni un roman, ni une biographie, plutôt un puzzle dont on doit reconstituer les morceaux.

    J'apprécie beaucoup Patrick Pécherot, aussi bien Tranchecaille que sa trilogie sur Paris parue en Série noire, c'est pourquoi j'ai immédiatement pris ce livre. Je dois dire que je me suis perdue dans ces chapitres qui, en ne voulant pas être linéaires, m'ont semblé bien labyrinthiques !

    J'ai trouvé un blog qui parle de ce livre, Le blog du castor, et son auteur est bien de mon avis...

    Cela ne m'empêchera pas de me précipiter sur le prochain livre de Patrick Pecherot !

  • Le retour du Général. - Benoît Duteurtre (Fayard, 2010)

    9782213629971.jpgLe roman commence avec un oeuf mayonnaise. Pour des raisons d'hygiène, les normes eutopéennes interdisent désormais aux tenanciers de bar de faire de la mayonnaise maison, et l'oeuf n'a plus du tout le même goût qu'avant... De cet incident nait une pétition, une manifestation, et arrive l'incroyable : un soir à la télé apparaît le Général de Gaulle ! Celui-ci va reprendre en main les décisions absurdes de Bruxelles, remettre en valeur ce qui faisait la grandeur de la France et redonner espoir aux Français. Bien que l'on se demande si c'est vraiment "le" Général, les Français sont ravis, mais cela peut-il durer...

    Benoît Duteurtre nous régale avec ce petit roman loufoque et impertinent qui dénonce les travers de la société actuelle tout en montrant qu'un retour en arrière n'est pas vraiment possible... Il en profite pour pointer les absurdités du monde contemporain et les injustices les plus flagrantes. Un petit roman léger, distrayant et drôle (c'est rare)  

  • Sans la télé. - Guillaume Guéraud (Le Rouergue, doAdo, 2010)

    9782812601620.gifChez Guillaume Guéraud, enfant, il n'y avait pas de télé. La télé c'est, dit sa mère, "pour les vieilles personnes qui ne savent plus quoi faire de leur vie". Mais pourtant à l'école il y a un tas d'enfants de son âge qui la regardent et qui partagent des tas de choses ensemble, sans lui. Mais rien à faire, sa mère ne veut pas céder. Pour le consoler, elle lui propose de l'emmener avec elle au cinéma voir les mêmes films qu'elle. Ainsi il va voir Mon oncle d'Amérique, Annie Hall, Tess, Kagemusha, Les temps modernes, les grands westerns ... Il a huit ans quand il voit tout ça et forcément il a un peu de mal à en parler à ses camarades d'école, mais néanmoins il réussit à leur faire envie et à en convaincre quelques uns (quelques unes même) de venir avec lui...

    Ce livre est vraiment une déclaration d'amour de Guillaume Guéraud au cinéma. C'est ce qui a marqué son enfance et modelé son imaginaire.

    Cela me rappelle une rencontre avec lui et Christian Lehmann il y a quelques années. Alors que Christian Lehmann se vantait de ne pas savoir combien de centaines, de milliers de livres même il avait lus, Guillaume Guéraud, à côté, rigolait et disait "Oh ben moi ce serait plus rapide à compter" ! Il a certainement beaucoup lu ensuite, mais son enfance ce sont les films et ce petit livre en est un beau témoignage.

    Ah oui, son film préféré : L'année du dragon de Michael Cimino.

  • La fortune de Silla. - Fabrice Humbert (Le Passage, 2010)

    9782847421545.jpgUn incident dans un grand restaurant parisien : un enfant un peu trop agité, un serveur qui manque de tomber et qui lui prend le bras pour légèrement le pousser, le père de l'enfant qui se lève et frappe violemment le serveur. Les autres clients regardent, médusés, mais personne n'intervient.

    Qui étaient ces clients ? Parmi eux un couple de Russes, elle universitaire, lui oligarque russe ; deux jeunes Français, traders ; un gros entrepreneur américain (celui qui a frappé), son fils, sa femme. Et Sila, le serveur. Qui sont-ils, pourquoi sont-ils là ce soir-là, où en sont-ils de leur vie ?

    Fabrice Humbert va nous faire tout à tour partager leur itinéraire jusqu'à cette soirée au restaurant où quelque chose va changer pour chacun d'eux. Rien ne sera jamais plus pareil après cet incident.

    Dans ce magnifique roman, Fabrice Humbert nous dresse un tableau féroce de personnages qui tentent de réussir coûte que coûte dans ce monde, même et surtout en écrasant les plus faibles. Le monde de la finance y est méticuleusement décrit, sans jamais lasser. Les personnages sont bien présents avec leurs forces et leurs faiblesses mais comme soumis à un destin inéluctable. En revanche la morale est sans appel : moins on est honnête, mieux on réussit dans notre société ! Ce n'est pas nouveau, certes, mais ici c'est montré avec beaucoup de cruauté et la "fortune" de Sila est bien prise dans le sens "hasard" et non pas "richesse" !

    Un dernier compliment à Fabrice Humbert : voilà un auteur qui sait terminer ses romans !

    L'avis de Papillon, Hélène , Aifelle et Amanda

    Le site de Fabrice Humbert

  • L'année sabbatique. - Pascal Garnier (POL, 1986)

    9782818001646.gifJ'ai lu ce livre cet été mais comme mon mari vient de le lire, je lui laisse la parole pour ce billet.

    "C'est le Pascal Garnier que l'on aime que l'on découvre dans ce recueil de nouvelles et on retrouve bien les qualités qui nous font apprécier cet auteur.

    Tout d'abord, les titres des nouvelles qui sont déjà tout un programme... et un bonheur: "Presqu'il", "N'être", "Le robinet sur la tempe",...et surtout ce petit bijou"Portrait d'un petit couple légèrement de trois quarts à une terrasse".

    Ensuite l'humour qui, comme chacun sait, est " la politesse des gens désespérés", et s'applique parfaitement à Pascal Garnier. Ces scènes de la vie quotidienne dans toute leur banalité peuvent brusquement déboucher sur des situations abominable. C'est ce va-et- vient constant entre le sordide et la poésie la plus pure qui nous accroche tout au long du recueil. Pascal Garnier, avec un sens de l'observation et du détail particulièrement poussé et dont l'absurde n'est jamais absent, nous entraîne dans une fascination pour le vide et  l'"à quoi bon ?" qui est une de ses caractéristiques, avec ce pessimisme très noir qui reste sa principale marque de fabrique.

    Quelques citations pour apprécier son écriture et ses trouvailles : "Faire flotter le radeau médusé qui lui servait de coeur", "Des grosses gouttes éclataient sur le trottoir comme des louches de pâte à crêpes au fond d'une poêle", "Elle se donnait du mal comme d'autres se donnent du plaisir",... "

    Merci Elvira pour ton cadeau et j'attends toujours que tu ouvres un blog pour nous faire partager tes nombreuses lectures !

  • L'origine de la violence. - Fabrice Humbert (Le Passage, 2009)

    humbert3.jpgLe narrateur, un jeune professeur d'histoire, va visiter le camp de concentration de Buchenwald et voit la photo d'un prisonnier qui ressemble étonnament à son père. De retour à Paris, il fait des recherches sur cette photo et sur le nom des personnages, découvre que cet homme s'appelle David Wagner et qu'en effet il fait partie de sa famille. On comprend assez vite avec le narrateur que cet homme est son grand-père, son père étant le fruit des amours de sa mère avec cet homme. Mais le roman ne s'arrête pas là, il va chercher à comprendre à quoi correspond cette photo, ce qui s'est passé avant et après, comment son grand-père est mort, fouillant inlassablement dans l'histoire de la Shoah... Cette enquête a de nombreuses conséquences dans sa vie personnelle, il quitte son travail d'enseignant pour continuer ses recherches, rencontre une jeune allemande dont le grand-père était SS, noue des liens avec son grand-père "officiel"...

    Je n'avais pas lu ce roman à sa sortie mais j'en avais beaucoup entendu parler. Je n'ai pas été déçue. C'est un livre magnifique, d'une extrême richesse documentaire et d'une grande sensibilité. Le thème de la Shoah, que j'ai trouvé artificiel dans d'autres romans, est ici traité avec beaucoup de sobriété. Et ce thème, même s'il est central, est enrichi par tout ce qu'il y a autour : les questionnements du narrateur sur lui-même, sur ses rapports avec son père et son grand-père, sur l'écriture, sur l'amour, sur sa recherche historique...Ou comment l'histoire familiale rencontre magnifiquement l'Histoire.

    Ce livre a eu le Prix Renaudot Poche 2010

    Les avis tout aussi enthousiastes de Papillon, Dominique, Sylire et beaucoup d'autres.

    Le site de l'auteur

     

  • Nagasaki. - Eric Faye (Stock, 2010)

    9782234061668.jpgShimura a une cinquantaine d'années et vit seul dans sa petite maison. Célibataire endurci à tendance maniaque, il aime l'ordre et range chaque chose à sa place. C'est pourquoi il ressent un malaise indéfini quand une fois, puis une autre fois, il a l'intime conviction que des objets ont changé de place. C'est infime mais suffisant pour le faire douter. Il entreprend donc de noter le niveau du jus de fruits. Pas de doute, quelqu'un en a bu (ça fait un peu Boucle d'or et les trois ours...), pourtant pas trace de vie. Peut-être qu'en installant une webcam... Et là, en effet, il la voit. Une femme entre deux âges, une ombre presque, qui vit chez lui à son insu. Shimura n'est pas fâché, étonné plutôt que quelque chose arrive enfin dans sa vie...

    Tiré d'un fait divers réel, ce joli petit récit est présenté comme un conte. Ou comment parler de soi, de son intérieur, de son intimité, avec subtilité mais aussi avec humour. Ce personnage restera longtemps dans nos esprits et attention si vous pensez avoir mal rangé un objet chez vous... Une petite déception toutefois : je pensais que l'auteur suggèrerait un happy end... c'est mon côté romantique...

    Laurent a aussi été sensible à l'humour de ce roman

  • Les insulaires et autres romans (noirs). - Pascal Garnier (Zulma, 2010)

    9782843045103.jpgDans La place du mort, Fabien apprend brutalement la mort de sa femme. Celle-ci s'est tuée dans un accident de voiture. Mais que faisait-elle en Bourgogne ? Et surtout que faisait-elle... accompagnée d'un homme, mort lui aussi... En plus d'être veuf, il apprend aussi qu'il était trompé ! Comment en savoir plus ? Il décide de faire la connaissance de la femme de l'amant, veuve donc elle aussi...Mais ce qui n'était au départ qu'une curiosité tourne au drame.....

    Dans Les insulaires, Olivier va à Versailles enterrer sa mère qu'il ne voyait plus beaucoup. Il y a longtemps qu'il a quitté cette ville. Il a la surprise de découvrir que la voisine de sa mère est une ancienne amie à lui, Jeanne, une ancienne amoureuse même, qui vit toujours avec son frère aveugle, Rodolphe. On comprend qu'un secret lie Olivier et Jeanne, et ce secret, Rodolphe le connait. Le soir un bon repas très arrosé leur permet de fêter leurs retrouvailles en compagnie d'un SDF que Rodolphe a ramené à la maison. Le matin le SDF est retrouvé mort dans la baignoire d'Olivier. Qui l'a tué ? A partir de là, le huis-clos va se transformer en drame et même carrément partir en vrille...

    Dans Trop près du bord, Eliette vit seule dans une maison isolée en Ardèche. Elle est veuve et s'est habituée à cette solitude. Pourtant quand elle prend un homme à bord de sa voiture, elle se sent troublée. Qui est cet homme ? Est-ce le même qui a pris la fuite après avoir renversé et tué le fils des voisins ? Et cette fille délurée qui les rejoint, est-ce bien sa fille ? Cette atmopshère lourde va très vite virer au grand-guignol puis au drame...

    Je suis habituée aux récits très noirs de Pascal Garnier, mais là j'ai vraiment trouvé que c'était du noir de chez noir ! Pas la moindre lueur d'espoir, les quelques moments heureux sont très vite balayés, les chutes sont irréversibles ! Pourtant ses précédents romans, malgré leur côté sombre, avaient des élans de tendresse. Mais en vérifiant la date du copyright, j'ai vu que ces nouvelles étaient des rééditions et qu'elles faisaient partie de ses premières publications. Son univers s'est donc quand même un peu éclairci avec le temps, disons qu'il est parti du noir ébène pour arriver au noir tout court... ;-)

     

    L'avis de Kathel

     

  • L'insomnie des étoiles. - Marc Dugain (Gallimard, 2010)

    9782070119998.jpgUne petite ville d'Allemagne en 1945. La guerre se termine. Une compagnie de militaires français s'installe sous le commandement du capitaine Louyre. Ici pas de criminels à traquer, pas de procès retentissant, c'est la vie de province chez les vainqueurs et les vaincus. Pourtant un détail intrigue Louyre : dans une ferme déserte, ils trouvent une jeune adolescente affamée et hirsute, Maria, que fait-elle là toute seule. Et dans la grange on retrouve les restes calciné d'un homme. Maria est mise sous la protection des militaires et Louyre va mener une véritable enquête sur cette énigme et aussi sur cet hôpital qui vient étrangement de fermer.

    Marc Dugain a un magnifique talent de conteur et il nous embarque tout de suite dans cette histoire  qui met en scène une période peu connue de la seconde guerre. Peu à peu se dévoile la vérité sur les crimes nazis commis dans cette petite ville. Voilà un très bon roman de la rentrée qui me donne envie de lire les précédents livres de Marc Dugain.

    L'avis de Bellesahi

  • Parle-leur de batailles, de rois et d'éléphants. - Mathias Enard (Actes sud, 2010)

    3410051884.jpgEn 1506, las des tergiversations de Jules II, Michel-Ange accepte l'invitation du sultan Bajazet et part à Istanbul (Constantinople alors) créer les plans d'un pont sur la Corne d'Or.

    A partir de ce fait historique avéré, Mathias Enard va imaginer le séjour de Michel-Ange. En effet comme source il n'y a que ses courriers à sa famille et le fait que ce pont... n'a jamais été construit.

    Le roman se termine par : "Pour le reste on n'en sait rien". C'est vrai et pourtant on se représente bien Michel-Ange tel que l'auteur le décrit. Préoccupé avant tout par son art, dessinant sans cesse, à l'écoute de la musique, de la poésie, troublé par un(e) danseur(danseuse ?), c'est l'univers du créateur que nous propose Enard avec beaucoup de sensibilité et de grâce.

    Je ne suis pas très amateur de roman historique, pourtant j'ai été charmé par ce joli petit roman qui m'a fait penser à une biographie de Michel-Ange lue il y a très longtemps, La vie ardente de Michel-Ange d'Irving Stone.

    L'avis très enthousiaste d'Amanda et modéré de Dominique