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Les routes de l'imaginaire - Page 70

  • Petit livre à l'usage des pères. - Christiane Olivier (Fayard, 2002)

    Christiane Olivier, psychanalyste, s’était fait connaître par « Les enfants de Jocaste » où elle essayait de donner une coloration plus féminine aux théories psychanalytiques basées plutôt sur le thème des « enfants d’Œdipe ». Selon elle, la toute puissance de la femme sur l’enfant (le maternage) accentuait  encore l’antagonisme, ou au moins les difficultés de compréhension, entre les hommes et les femmes.

    Ici elle tente une fois encore de faire évoluer la psychanalyse avec la société actuelle. En effet, le rôle du père, trop souvent mis au second plan dans la petite enfance de l’enfant, prend ici toute son importance. Face à des femmes qui, souvent, tentent de garder pour elle la relation très forte entretenue avec le bébé, elle enjoint les pères de prendre aussi leur place dans cette relation. L’avenir des relations père-enfant dépendra toute la vie des relations précoces mises en place entre le bébé et son père et l’autorité paternelle ne pourra exister que si la tendresse et la confiance sont déjà présentes.

    Christiane Olivier, que l’on pouvait taxer de « féministe »,  explique ici aux femmes qu’elle ont tout à gagner à « perdre » un peu de leur part d’intimité avec l’enfant au profit du père. Partager ces relations intimes ne pourra que rendre service aux enfants qui y gagneront davantage de confiance et d’équilibre dans leur vie d’adulte.

     

  • Love Hina (vol 1) . - Ken Akamatsu (Pika Edition, 2002)

    Cà y est, j’ai lu mon premier manga, à la demande express de mon fils qui, lui, en dévore !

    Ce premier volume de « Love Hina » raconte l’histoire d’un étudiant, Keitaro, qui tente pour la troisième fois d’intégrer la prestigieuse université de Todai. Pour se loger, il se rend dans l’hôtel tenu par sa grand-mère mais, après avoir pris un bain dans la piscine, il se retrouve entouré de jeunes filles nues en train de baigner. Exclamations,cris, quoi, un homme dans le bain des filles ! En fait l’hôtel a été transformé en pension pour jeunes filles, et celles-ci s’apprêtent à mettre Keitaro à la porte mais celui-ci reçoit une lettre de sa grand-mère le nommant gérant de cette pension. Il va falloir que lui et les jeunes filles s’entendent ! La suite est le quotidien d’un jeune homme timide, maladroit et gaffeur dans un univers très féminin.
     
    Je dois dire que c’est bien mené, plein de péripéties et assez drôle. En revanche, je trouve que le petit format rend les dessins un peu confus (le manque d’habitude de ma part visiblement), et j’ai eu un peu de mal à distinguer toutes ces filles entre elles, les dessins se ressemblant quand même pas mal ! Bref je lirai peut-être d’autres mangas, on n’a que l’embarras du choix !

  • Rendez-vous : la psychanalyse de François Mitterrand. - Ali Magoudi (Maren Sell, 2005)

    Tout d’abord précisons que le titre est un peu trompeur. En effet Mitterrand n’a pas suivi une psychanalyse proprement dite avec Ali Magoudi (psychanalyste, élève de Lebovici), ce dernier s’en explique dans la préface. Non, il n’a pas reçu le Président dans son cabinet pour des séances régulières. En revanche, oui, il l’a rencontré régulièrement pendant une dizaine d’années pour des entretiens, il l’a suivi dans de nombreux voyages et il a longuement parlé avec lui de psychanalyse et de sujets plus personnels. L’ouvrage lui-même, une sorte de « docu-fiction », lui aurait été suggéré par Mitterrand lui-même. En effet il s’interrogeait profondément sur deux sujets : pourquoi  est-il devenu Président de la République et pourquoi a-t-il développé un cancer. 

    L’exercice d’Ali Magoudi, même si celui-ci mélange parfois la fiction et la réalité, est tout de même intéressant. En reprenant des entretiens qu’il a eus avec Mitterrand et des passages de ses livres autobiographiques, il met en relief les relations de celui-ci avec sa famille, notamment avec un de ses oncles décédé dont il a plus ou moins pris la place pour les études, puis auprès des grands-parents, puis en prenant son nom comme nom de résistant par exemple. L’interrogation sur la mort qui était, comme on le sait, très présente chez lui, réapparaît à de nombreuses occasions. De même que l’image de Gaulle, et aussi celle du pape, et bien sûr celles de ses amis et adversaires politiques.

    On a tellement écrit sur Mitterrand qu’il est difficile d’apprendre des choses vraiment nouvelles sur lui. Disons que l’on voit ici comment procède un psychanalyste et comment avance une analyse. Et c’est vrai que le sujet analysé est particulièrement riche….

    http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3260,36-714279,0.html


     

  • Mort d'un silence. - Clémence Boulouque (Folio, 2004)

    Le juge Boulouque, çà vous dit quelque chose ? Mais si, les attentats de 1986 (rue de Rennes, etc…), le terrorisme, l’affaire Gordji, le « Pouvez-vous me dire droit dans les yeux…. » de Chirac à Mitterrand, l’Iran…et le juge anti-terroriste Gilles Boulouque. Sa fille Clémence avait une dizaine d’années alors, et sa vie de petite fille a basculé à partir de cette année-là. Son père est menacé, des gardes du corps ne le quittent pas, elle-même ne peut plus sortir seule avec ses camarades. La pression politico-médiatique se fait plus forte sur lui, il est pris à parti par la presse, inculpé pour avoir brisé le secret de l’instruction. Et le 13 décembre 1990 il se suicide. Bien sûr Clémence ne comprend pas. Comment a-t-il pu les abandonner, comment a-t-il pu choisir leur souffrance plutôt que sa souffrance à lui ?

    Sans pathos, Clémence retrace les dernières années passées avec son père en essayant de retenir au maximum les souvenirs qui lui restent. Il en est un particulièrement émouvant, c’est quand elle se souvient que, quelques jours avant le suicide de son père, elle lui a refusé de s’asseoir à côté d’elle sur le canapé pour regarder la télé, il fallait rentrer plus tôt lui dit-elle…

    C’est son premier livre. Elle l’a écrit alors qu’elle était à New-York en septembre 2001 et que le terrorisme la « rattrapait » !

  • A propos de Yumiko Seki, l'auteur de "Chaud-froid"

    Mon collègue et ami Christophe ( http://kotori.canalblog.com/ ) a assisté à une rencontre avec Yumiko Seki, l'auteur de "Chaud-froid" dont j'avais parlé il y a quelque temps ( http://les-routes-de-l-imaginaire.blogspirit.com/archive/2005/07/06/chaud-froid-yumiko-seki-lattes-2005.html ). Il a pris le temps de faire un compte-rendu de cette soirée. Je l'en remercie et le publie ici.

    Rencontre organisée par la médiathèque des Sept mares, l’association des amis de la médiathèque et la librairie le Pavé dans la mare, à Elancourt (78)

    Auteur de « Chaud froid » chez Lattes, premier roman paru en 2005, le livre de Yumiko Seki n’est pas autobiographique, même si Seki et Yuka le personnage de son livre, ont de nombreux traits communs. Journaliste a la NHK, télévision japonaise, Seki voulait d’abord faire valoir un regard japonais sur la société française, alors que de nombreux écrivains nous ont fait partager leur fascination ou leur répulsion face a cette civilisation (de Bouvier à Nothomb).

    Seki nous fait partager la frustration de ne pouvoir exprimer plus de choses dans un pays dont elle maîtrise mal la langue, cette volonté de prendre la parole après de nombreuses années et d’exprimer par le titre de ce roman que le feu couve sous la glace des apparences, ce reproche de froideur fait aux asiatiques ne serait en réalité qu’un trop plein d’émotions, attirée par la France en raison de son rayonnement culturel durant les années cinquante et soixante, tandis que le Japon traumatisé par la guerre commence son expansion économique, la France berceau du surréalisme semble être un pays étrange par la complexité de la mentalité de ses habitants où esprit de contradiction et esprit critique se côtoient. Fortement influencée par Echenoz côté français, Kenzaburo Oe, Abe Kobo et Haruki Murakami, côté japonais, Yumiko Seki écrit directement en français, manuscrit réécrit dix fois, longuement travaillé pour en arriver a un style minimaliste (empêchant aussi les fautes comme le fait remarquer avec humour son auteur)

    Cette rencontre fut l’occasion d’évoquer aussi la société japonaise contemporaine, du syndrome de Paris dont certains japonais sont atteints ( et dont Seki est l’auteur d’un documentaire a ce sujet), les phénomène otaku et manga, les modes promptes à proliférer, l’autre regard porté sur le Japon par l’Occident après les succès technologiques du walkman et des  jeux vidéos, passant d’un pays de copieurs au rang de créateurs, l’évolution des mentalités et la place de la femme.

    Avec un deuxième roman en préparation, souhaitons à Yumiko Seki de nous faire partager un peu plus son regard, qui s’affranchit  petit a petit du carcan des nationalités.

  • Un secret sans importance. - Agnès Desarthe (L'Olivier, 1996)

    Pourquoi ai-je pris ce livre ? C'est d'une part parce que Jean-Philippe Blondel le cite dans un de ses commentaires sur son livre (un peu plus bas sur mon blog), d'autre part parce que c'est la fille d'Aldo Naouri, pédiatre et psychanalyste que j'apprécie beaucoup, et enfin parce qu'il parait que ses romans jeunesse sont excellents.....Où l'on voit que les critiques littéraires n'ont pas un rôle majeur pour le choix de mes lectures ;-)

    Dans une banlieue indéterminée, plusieurs personnages se trouvent réunis et leurs destins se mêlent et s'entre-mêlent.Il y a là Emile Hortchak, linguiste, sa secrétaire, la pulpeuse Harriet, son ami Dan Jabrowski et Sonia, la femme de celui-ci, Gabriel Schwartz, un jeune chercheur, et Violette Opass, une étrange voisine. Que se passe-t-il entre eux ? Des rencontres, des amitiés, des jalousies, la vie quoi ! Tout ce petit monde évolue avec ses drames et ses joies dans un quotidien souvent un peu rêvé.

    Agnès Desarthe est une grande admiratrice de Isaac Bashevis Singer et cette ambiance de quartier juif new-yorkais a sans doute beaucoup à voir avec son univers. Pour ma part je connais mal Singer mais cela m'a fait penser aux personnages et à l'univers de Jérome Charyn, ce qui revient sans doute à peu près au même ! Bref, c'est un peu embrouillé mais plein de charme et de tendresse, et, comme le notait JP BLondel, le passage sur la mort de Sonia est inoubliable !

     

  • Comment échapper à sa femme et ses quadruplées en épousant une théorie marxiste. - Tom Sharpe (Belfond, 2005)

    A tous les bibliothécaires et libraires auxquels les lecteurs demandent : "Vous n'auriez pas un livre drôle à me conseiller ?", donnez-leur celui-ci ! Les aventures de Wilt sont franchement hilarantes et, pour peu que l'on accepte du loufoque et de la caricature, on sourit et même on rit franchement.

    Wilt, professeur dans un centre de formation pour adultes, essaie de trouver une excuse pour éviter d'aller passer les vacances chez l'oncle de sa  femme, un militaire  américain en retraite, raciste et anti-communiste. De   plus, ses quatre filles adolescentes risquent de ne pas être des modèles de jeunes filles bien élevées ! Non, c'est décidé, il va réaliser ce dont il rêve depuis longtemps : partir à pied dans la campagne anglaise, au hasard, à la découverte des petits villages et des auberges accueillantes. Bien sûr une successsion de quiproquos et de rebondissements vont le conduire à être mêlé à un crime, tandis que sa femme et ses filles vont être prises pour de dangereuses trafiquantes de drogue et les situations comiques vont se succèder en égratignant au passage les travers des Anglais et des Américains!

    A lire d'une traite, le sourire aux lèvres !

     

  • L'attentat. - Yasmina Khadra (Julliard, 2005)

    Ce livre est un véritable coup de poing dans l'estomac ! L'attentat c'est celui qui a lieu dans un restaurant de Tel Aviv, tuant une quinzaine d'enfants. Amine, chirurgien israelien d'origine arabe, opére toute la nuit les nombreux blessés. Quand il rentre enfin chez lui se reposer, la police lui apprend non seulement que sa femme est morte dans l'attentat, mais surtout que c'était elle le kamikaze. La terre semble s'ouvrir sous lui tellement cette révélation l'anéantit. Sans renier du tout leurs origines arabes, Amine et sa femme n'étaient pas pratiquants et rien ne laissait supposer cette attitude extrêmiste. Qui a-t-elle rencontré ? Depuis quand ? Quel a été son cheminement pour aboutir à ce geste ultime de martyre ?

    J'ai lu ce livre d'une traite. Secouée d'abord par les cinquante premières pages du roman qui décrivent l'attentat et ses conséquences. Compatissante ensuite pour Amine qui vit le rejet de la plupart de ses amis et la douleur de la perte. Accrochée enfin par sa quête inlassable pour retrouver les personnes rencontrées par sa femme et qui l'ont endoctrinée et piégée (selon lui).

    C'est vrai que ce sujet grave est traité sous la forme d'un roman et qu'il n'échappe pas à quelques détails simplificateurs (des arabes parfaitement intégrés à la vie israelienne, un couple parfait, aucun détail qui aurait pu donner des soupçons à Amine, ...) mais dans l'ensemble je trouve qu'il est très instructif pour des lecteurs occidentaux. Non les kamikazes ne sont pas tous des fous ; oui les palestiniens veulent se venger des humiliations subies ; même si les attentats sont bien sûr inacceptables, que reste-t-il à ceux qui ont tout perdu à part la lutte armée?...

    Autant de réflexions que pose ce livre très bien écrit, comme d'habitude, par Yasmina Khadra qui lutte inlassablement pour que l'humanisme remplace la barbarie.

  • Un retour. - Alberto Manguel (Actes Sud, 2005)

    Nestor Fabris, exilé argentin habitant Rome, reçoit une invitation pour le mariage de son filleul, à Buenos Aires. Il n'est jamais retourné en Argentine et c'est avec appréhension qu'il prend l'avion. Pourtant c'est d'abord le plaisir de retrouver sa ville natale qui l'envahit. Il arpente les rues, visite les boutiques. Il retrouve même quelques amis d'alors. Mais curieusement les événements mystérieux s'enchaînent. Pourquoi ne retrouve-t-il pas la rue de son hôtel, pourquoi son amie d'alors ne le reconnait-elle pas, pourquoi le café où il s'installe a-t-il des allures fantômatiques... Le récit devient peu à peu fantastique. Cette ville ne contient plus que les fantômes de ses amis, et ceux-ci lui reprochent de les avoir abandonnés en s'exilant.


    On comprend que Manguel ait eu besoin de reparler de cette période douloureuse de sa vie qui doit le hanter comme un cauchemar sans fin. C'est suffisamment fort pour marquer le lecteur, peut-être un peu court, on aurait aimé partager encore avec Manguel un morceau de sa douleur.

  • Spaghetti. - Gérard de Cortanze (Gallimard, Haute Enfance, 2005)

    Je dois dire que je n'avais jamais lu de romans de Gérard de Cortanze auparavant. Je le voyais comme un auteur plutôt brillant, parisien, et écrivant des romans foisonnants et d'inspiration historique.

    Dans ce récit, c'est son enfance et sa famille qu'il nous présente et c'est vrai qu'on le voit sous un jour plus intime. Il nous raconte qu'il a doublement souffert de ses origines, étant enfant. En effet non seulement on le traitait de "spaghetti" et de "macaroni", mais on se moquait de ses origines nobles ! Quant on dit "noble", il s'agit de nobles désargentés !  Tout ce qu'il raconte dans ses romans, notamment dans "Les Vice-rois", vient directement des aventures inombrables et assez abracadabrantes de sa famille. Ruiné, ayant perdu leur château familial, ils doivent s'exiler en France pour certains, en Angleterre pour d'autres, et là commencent les aventures !

    Voilà un extrait d'une interview, elle donne bien le ton que Cortanze a donné à son ouvrage :

    "A l'école, ça n'a pas tardé: Les aristocrates à la lanterne. Même les profs me disaient que je n'aurais pas dû être là puisque mes ancêtres avaient été guillotinés. J'ai entendu très souvent aussi que j'étais un macaroni, un spaghetti, un rital. Donc, en même temps, j'étais fier et je ne l'étais pas. Du côté de ma mère, là, c'est une marmelade incompréhensible. Le père de ma mère descend de Pierre Pezza. C'est un Napolitain, qui s'installe à Turin, se marie avec ma grand-mère et lui fait cinq enfants. C'est un maçon qui joue de l'accordéon le soir dans les bals et, au moment de la naissance du sixième enfant, il plaque tout pour une jeunesse. Mais on ne racontait pas ça aux enfants il y a cinquante ans. L'écriture est née de ce mystère total."