Ce Suisse allemand se fait rare, pourtant chacun de ses ouvrages est un petit bijou ("Canto", "Dans la maison les histoires se défont",...)
L'histoire est toujours mince. Ici le narrateur a hérité de sa tante un petit appartement à Paris. Il hésite à se l'approprier complètement, il le hume, l'apprivoise. Mais son grand plaisir est d'errer dans les rues de Paris et de retrouver dans les bars des sensations perdues, et même, qui sait, un peu d'amour et de désir.
L'histoire est ténue. C'est le style précis, léger, presque virevoltant, qui donne au récit cette merveilleuse impression d'être une invitation au voyage, un voyage parisien mais surtout intérieur.
Les routes de l'imaginaire - Page 66
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La fourrure de la truite. - Paul Nizon (Actes Sud, 2006)
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Les mauvaises gens : une histoire de militants. - Etienne Davodeau (Delcourt, 2005)
Déjà beaucoup de commentaires sur cette bande dessinée qui a eu le Prix du meilleur album au Festival d'Angoulême 2006, le Prix du Public et celui du Scénario. Dans la région de Cholet, dans les années d'après-guerre, la vie est difficile pour les ouvriers. Les parents de l'auteur vont peu à peu découvrir, grâce au curé et aux JOC, le militantisme. Tout une période défile devant nous et les luttes d'hier nous rappellent que des gens se sont battus pour que nous ayions une vie meilleure.
J'avais eu un coup de coeur pour "Rural" du même auteur qui inaugurait sa période bande dessinée documentaire. "Les mauvaises gens" est de la même veine. A lire absolument. -
"Nicolas Bouvier : 22 Hospital Street"
Arte a passé le week-end dernier ce film mi-fiction, mi-documentaire sur le séjour de Nicolas Bouvier à Sri-Lanka. Ce séjour se situe après son périple de deux ans à travers les Balkans, la Turquie, l'Iran et une partie de l'Asie en 1955. Il était alors tout jeune et venait de réaliser son rêve de partir avec son ami Thierry Vernet. Ce voyage devait profondément le marquer et bouleverser durablement son oeuvre. Très longtemps après il en tirera son chef d'oeuvre "L'usage du monde". Et donc, à la fin de ce périple, il arrive à ce qui s'appelait alors Ceylan, il y reste seul car Thierry y retrouve sa fiancée et repart en Europe. C'est alors qu'il attrape la malaria et d'autres cochonneries et reste plusieurs mois dans un état semi-délirant, attendant désespérément que la saison des pluies s'arrête pour reprendre un avion.
C'est sa quête existentielle et ses débuts d'écrivain itinérant que retrace "Nicolas Bouvier: 22 hopital street", un documentaire riche en émotions réalisé par Christophe Kühn. Marchant dans les traces de Bouvier, le cinéaste tente de comprendre comment il en est venu à considérer le voyage comme un préalable à la découverte de soi et comme la condition de l'éveil du potentiel de chacun. A voir absolument. Et lire, si on ne l'a pas déjà fait, "Le poisson-scorpion" qui retrace cet épisode.
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Une épopée littéraire.-Jorn Riel (Gaïa, 2006)
Si je vous parle d'un Islandais qui triche aux cartes grâce à sa chienne avec laquelle il parle ; d'un petit chasseur moche et bourré de complexes qui devient un véritable héros polaire ; de trente-huit boîtes de sardines qui sauvent un chef d'oeuvre littéraire ; et d'un capitaine qui va regretter de ne pas s'être occupé de cette histoire de rat ! Vous aurez compris que l'on est dans le monde merveilleux des racontars de Jorn Riel. On retrouve son âme d'enfant à lire ces histoires extraordinaires ! Ces quatre nouvelles ont déjà été éditées, elles ressortent ici dans une collection pour la jeunesse (oui çà peut être lu très tôt !)
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Ravel.-Jean Echenoz (Minuit, 2006)
Je ne suis pas une fanatique des biographies, l'oeuvre m'intéresse en général en elle-même. J'apprécie donc Ravel, sa Pavane, ses Valses, ses Concertos, et sa Shéhérazade par Régine Crespin (ah, le merveilleux "Asie"), sans bien connaître la vie de son auteur. Toutefois, puisque c'est noté "Roman" sur la couverture du dernier Echenoz...
Bien m'en a pris car ce n'est bien sûr pas une biographie. Je pense qu'il n'y a pas d'erreur sur les grands événements relatés dans le livre, la grande tournée aux Etats-Unis, les péripéties du Concerto pour la main gauche, la maison de Montfort l'Amaury,... Mais pour le reste... c'est du Echenoz ! L'écriture précise et épurée de l'auteur va comme au gant au dandy Ravel qui promène sa mélancolie, sa solitude et ... sa mauvaise humeur dans le Paris d'alors. Le texte est toujours ironique et c'est un régal pour le lecteur qui n'en saute pas une ligne.
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L'Agenda.-Hélène Montardre (Rageot, 2006)
Un jour Jérémie trouve par hasard un agenda au CDI. il s'apprête à le rendre à sa propriétaire (c'est sûr, il appartient à une fille !) mais il n'y a pas de nom ! Pourtant c'est quelqu'un d'extrêment populaire, il y a des mots écrits partout, des dessins, des photos, des coeurs ! Poussée par la curiosité, il se met à le lire, soir après soir, et dans la journée il essaie de mener son enquête. Il est d'autant plus étonné que la fille de l'agenda note qu'elle vient de perdre sa mère il y a quelques semaines. Il allait presque abandonner quand il voit que la propriétaire de l'agenda a un rendez-vous demain à 15 h dans le parc... Il va enfin savoir qui c'est...
C'est un roman sympathique qui fait bien revivre le monde du collège avec ses histoires, ses clans, ses amitiés. La relation entre Jérémie et la propriétaire de l'agenda sont bien vus. J'ai toutefois regretté que la postface vienne complètement retourner l'histoire ! Je trouve qu'elle était suffisamment romanesque pour ne pas en rajouter une couche qui la rend, certes, intéressante, mais quand même un peu confuse.
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Les brûlures du jour.-Hubert Ben Kemoun (Nathan poche, 2006)
Le célèbre metteur en scène Jean Corrèze vient faire travailler les élèves d'un collège. Au programme, le Cid. Sabine, l'amie de Max, est Chimène. Romain est Rodrigue. Mais Max est jaloux. Est-ce lui qui a agressé Romain sur son vélo ? En tout cas c'est bien Max qui décide de provoquer un drame pendant une répétition pour se venger de la trahison de Sabine. Mais bien sûr le destin en décidera autrement...
L'intrigue policière est classique, mais la description des répétitions est bien vue. Et cette querelle de collégiens prend tout à coup des airs de tragédie classique...
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Entre les murs. - François Bégaudeau (Verticales, 2006)
Je n'avais pas vraiment prévu de lire ce livre dont on parle beaucoup (Prix France-Culture -Télérama, nombreux articles dans la presse). mais le hasard... Je savais que c'était une chronique de la vie de collège, vue côté classe et côté salle des profs. Pas de commentaires entre les eux, juste des instantanés de l'année scolaire. Les élèves sont plutôt classés "difficiles" (l'auteur a enseigné dans le 19è), ils n'ont ni la maîtrise du langage classique, ni le respect de la hiérarchie. Comment fait-on dans ces cas-là ? L'auteur oscille entre le respect du programme et, même s'il n'insiste pas sur le point-virgule, il essaie de leur apprendre la subtilité de la conjugaison française. Il essaie aussi de les considérer comme des individus à part entière. Il s'énerve parfois contre eux mais au moins on voit qu'ils existent pour lui. Les profs, dans la "salle des profs", parlent de tout sauf de pédagogie (çà, on l'aurait deviné !)
Franchement mon avis est mitigé. Le style sobre, le découpage en petites séquences, la description des "sas" au café du coin, tout çà m'a intéressée. La retranscription des dialogues avec les jeunes n'est ni artificielle ni exagérée. C'est un vrai travail d'écriture (ce n'est pas publié à Verticales pour rien). En revanche j'ai l'impression que Bégaudeau n'aime pas vraiment ni les élèves, ni l'enseignement. Sa façon très cynique de se moquer d'eux peut être prise au second degré mais bon, il les fait quand même toutes ces remarques moqueuses.... D'ailleurs ses élèves se plaignent qu'il les "charrie" trop ! Et puis pointer du doigt les profs qui ne pensent qu'à compter le nombre de jours fériés dans l'année et à pester contre les élèves, je trouve que c'est facile ! Ce qui m'a étonnée, en revanche, mais je ne suis pas enseignante, c'est la difficulté qu'ont les élèves à comprendre tout simplement le prof quand il leur parle "normalement". Les profs ne sont pas préparés à ce que le vocabulaire oral courant ne soit pas toujours compris par les élèves, et çà je ne m'en rendais pas compte ! -
Rencontre avec Jean-Philippe Blondel
Il était une fois une Cathe qui avait fait un commentaire de "Un minuscule inventaire" de JP Blondel sur son blog. Un matin, elle ouvre son blog, et , surprise, JPB lui avait laissé un message ! Oui il était content de ce qu'elle avait dit de son livre, non il n'était pas d'accord avec tout mais bon... Et commença un échange de quelques messages sympathiques. C'est alors qu'Elisabeth passa par là ! Conseillée par Cathe, elle avait lu le "Minuscule inventaire", avait eu la larme à l'oeil à la fin, et demandait à JPB, s'il passait par là (par le blog !) s'il voulait venir en parler devant les lecteurs de sa bibliothèque ! Sitôt dit, sitôt fait ! Voilà pourquoi la semaine dernière, à la bibliothèque des Essarts le Roi (c'est dans les Yvelines), JPB venait rencontrer Elisabeth, Cathe et les lecteurs !
Elisabeth avait fait très fort ! Une quarantaine de personnes qui avaient presque toutes lu tous les livres de l'auteur étaient présentes. L'auteur était ravi. Il nous a raconté sa boulimie d'écriture, son boulot de prof (qui le passionne), sa méthode pour écrire (il n'en a pas), ses débuts d'écriture (très tôt), son premier roman édité (très tard, enfin.... presque vingt ans après). Bref il a séduit tout le monde, beaucoup fait rire et aussi beaucoup ému. Non il ne pourrait pas se passer d'écrire. Oui il a un nouveau roman à paraître à la rentrée, "Passage du gué", et il nous en a lu un passage.
Des romans qui appuient fort sur le bouton de la nostalgie, un auteur qui aime la vie et les gens. C'est çà Jean-Philippe Blondel et c'est pour çà qu'on l'aime ! (faut pas que je raconte trop de bêtises, il va venir voir ce que j'ai écrit ;-) ) -
8,20 g de cholestérol.-Joseph Bialot (Fayard, 2006)
Plus connu pour ses polars et, depuis peu, pour ses bouleversants récits de déportation à Auschwitz " C'est en hiver que les jours rallongent " et " La station Saint-Martin est fermée au public ", Joseph Bialot s'essaie ici à la nouvelle. Sous des formes différentes telles que le conte, le courrier ou la fable, il fustige ici le conformisme, la consommation, la méchanceté et la bêtise.
Comme tous les recueils de nouvelles, c'est inégal. Personnellement j'ai un faible pour la lettre que Frédo-Doigts-de-Fée, (cambrioleur en prison) envoie à un inspecteur des impôts. En effet on lui reproche de ne pas avoir compté le montant de son hold-up dans sa déclaration de revenus (c'est tiré d'une histoire vraie… çà ne s'invente pas). Il précise que les personnes volées majorent le montant de leurs pertes, donc çà lèse le voleur. Et que doit-il déclarer exactement dans " Traitements et salaire " ? Et quand on lui demande son domicile, doit-il préciser qu'il est en prison pour un certain temps ?…
Quand même plutôt noires que roses, ces nouvelles peuvent se résumer par ce mot que rappelle Bialot : "Dieu aime les pauvres et donne aux riches" !