Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Entre les murs. - François Bégaudeau (Verticales, 2006)

Je n'avais pas vraiment prévu de lire ce livre dont on parle beaucoup (Prix France-Culture -Télérama, nombreux articles dans la presse). mais le hasard... Je savais que c'était une chronique de la vie de collège, vue côté classe et côté salle des profs. Pas de commentaires entre les eux, juste des instantanés de l'année scolaire. Les élèves sont plutôt classés "difficiles" (l'auteur a enseigné dans le 19è), ils n'ont ni la maîtrise du langage classique, ni le respect de la hiérarchie. Comment fait-on dans ces cas-là ? L'auteur oscille entre le respect du programme et, même s'il n'insiste pas sur le point-virgule, il essaie de leur apprendre la subtilité de la conjugaison française. Il essaie aussi de les considérer comme des individus à part entière. Il s'énerve parfois contre eux mais au moins on voit qu'ils existent pour lui. Les profs, dans la "salle des profs", parlent de tout sauf de pédagogie (çà, on l'aurait deviné !)

Franchement mon avis est mitigé. Le style sobre, le découpage en petites séquences, la description des "sas" au café du coin, tout çà m'a intéressée. La retranscription des dialogues avec les jeunes n'est ni artificielle ni exagérée. C'est un vrai travail d'écriture (ce n'est pas publié à Verticales pour rien). En revanche j'ai l'impression que Bégaudeau n'aime pas vraiment ni les élèves, ni l'enseignement. Sa façon très cynique de se moquer d'eux peut être prise au second degré mais bon, il les fait quand même toutes ces remarques moqueuses.... D'ailleurs ses élèves se plaignent qu'il les "charrie" trop ! Et puis pointer du doigt les profs qui ne pensent qu'à compter le nombre de jours fériés dans l'année et à pester contre les élèves, je trouve que c'est facile ! Ce qui m'a étonnée, en revanche, mais je ne suis pas enseignante, c'est la difficulté qu'ont les élèves à comprendre tout simplement le prof quand il leur parle "normalement". Les profs ne sont pas préparés à ce que le vocabulaire oral courant ne soit pas toujours compris par les élèves, et çà je ne m'en rendais pas compte !

Commentaires

  • Je lis autant de bien que de mal sur ce bouquin... Difficile de me faire une idée... Je pense que je le lirai, quand il sera dispo à ma bibli !

  • j'avais plein d'a priori - étant moi-même prof depuis 20 ans - tous ne sont pas tombés ( la salle des profs est très caricaturale, tout ce lien humain qui se crée avec les élèves n'est présent qu'en creux ) et le livre donne une impression très partielle du métier, même si elle n'est pas fausse..disons que après une nouvelle décennie d'enseignement, Bégaudeau aurait écrit ce livre d'une façon différente - Néanmoins, le côté brut est intéressant et le livre se lit très facilement et fait souvent mouche - et rire. Pourtant, il émeut peu - et c'est un métier où on est souvent ému, il me semble - disons que la perspective "journalistique" empoyée par Bégaudeau montre ses limites...une question un peu vacharde : il a fait comment, l'auteur ? Il est allé enseigner avec la perspective d'écrire un bouquin et il a écrit les inscriptions présentes sur les sweats des élèves après chaque heure de cours, en notant scrupuleusement leurs "sorties" ? Ca paraît étrange, non ?
    jp

  • c'est un roman, pas un "docu-fiction" !
    Si l'auteur "accentue" voire "amplifie" la réalité il n'en est que moins un bon auteur.
    J'ai cherché des bouquins sur la pédagogie, des faits relatés par des enseigants des vrais, résultat : pas grand chose. Mais avec ce roman, j'entend mieux connaitre "les élèves". Je trouve que certains passages du livre sont émouvants d'autres filent la trouille mais n'est ce pas ce que l'on attent d'un roman : un ancéphalogramme tout sauf plat.
    Jessica (qui essait de devenir enseignante)

  • J'ai également trouvé que ce livre manquait d'émotion. Au fond il est assez ennuyeux. Et que veut-il nous dire ? Je n'ai rien appris sur les ados dans ce livre. Peut-être parce que je les connais bien, mais je ne suis certainement pas la seule.
    Et qu'ils sont heureusement infiniment plus riches que le regard porté sur eux "entre les murs"
    J'attendais désespérement que le narrateur parle à la fin des cours aux mômes, de n'importe quoi, mais sûrement d'autre chose que des punitions qu'il leur infligerai en guise de représaille.

  • Décidément ce livre amène bien des discussions.....

  • j'ai eu l'occasion d'entendre F.Bégaudeau à la radio(il y est beaucoup passé quand son livre est sorti.il est probablement passé aussi à la télé(?)).
    Je n'ai pas lu son livre,et je doute le lire un jour ,mais je prends le pari que dans 10 ans,peut-être même 5,F.Bégaudeau n'enseignera plus:il se sera alors fait un nom,sera consulté pour des commentaires sur l'enseignement(puisqu'il en aura l'expérience,n'est-ce pas?,et qui plus est auprès d'élèves "difficiles").Et il expliquera,si la question lui est posée,qu'il n'enseigne plus car il fallait bien faire un choix entre ses diverses activités.Il ne sera bien sûr pas question de meilleures conditions de vie et de rémunération...
    Nous pourrons dire alors:"Bien joué Monsieur Bégaudeau!"

  • @ jean-loup : Il parait même qu'il n'est déjà plus prof mais uniquement journaliste....

  • Hi!Cathe.(branché,le "Hi!",n'est-ce pas?).
    Plus sérieusement:merci pour l'info.à vérifier quand même,et à suivre...

  • Faux ! il enseigne toujours. Et je prends le pari que dans dix ans, il enseignera encore.

    Personnellement, je pense que l'émotion y est. Mais il est pudique le garçon, c'est pour ça. Et moi je trouve JUSTE la distance qu'il conserve avec les élèves. Je trouve qu'il les respecte bien mieux en se conduisant comme ça qu'en cherchant comme d'autres à se rapprocher.

    Quant à la description de la salle des profs, si la personne qui dit que c'est caricatural est prof, elle peut ne pas être comme cela elle-même, mais ça ne l'empêche pas d'être d'une indulgence, inconsciente sans doute, mais crasse vis-à-vis de ses collègues ; et peut-être qu'elle est EXACTEMENT comme ça et qu'elle ne se voit pas faire. Si elle n'est pas prof, qu'elle sache que ce n'est pas caricatural, malheureusement, en tout cas dans beaucoup d'endroits.

    Pau Riaba

  • On nous livre ici des éclats de classe, des instantanés, des petits moments de vie, pris dans ces classes difficiles. On voit le fossé qui sépare le prof et les élèves. Je veux dire par là, le gouffre qui sépare le pauvre gars qui débarque dans le lycée avec ses programmes conçus dans les ministères (et qu'il doit suivre) et les gamins qui n'ont pas le même langage, les mêmes références, pour qui les règles de grammaire du français paraissent être un exercice de surréalisme stérile. J'ai été sensible à celà parce que je l'ai vécu...
    Difficile pour les gosses de ne pas se sentir en échec, de se sentir concernés par ce que raconte le prof quand on a si peu de références communes, ils sont tout de même de bonne composition ces gamins et les profs aussi....
    Par contre je n'ai pas trouvé juste le climat de la salle des profs, en zone difficile en général les gens essaient de faire tout leur possible pour que ça marche, pour accrocher les gamins, pour faire passer un minimum de choses. Il y a des moments de découragement, et parfois de rage mais je n'y ai jamais connu cette ambiance glauque de gens qui ne cessaient de se plaindre sans s'écouter les uns les autres. Ca je le trouve plutôt dans des collèges lambdas sans problèmes particuliers....les profs nombrilistes.

    C'est un livre qui se lit vite, intéressant pour ceux qui n'ont pas connu ces établissements et qui se rendent compte de la vie quotidienne de ce genre d'endroits. C'est un témoignage simple, un livre qui évite les constats stériles puisqu'ils sont en général dépourvus de solutions concrètes. Je crois que c'est pourquoi j'ai aimé ce énième livre sur le sujet...

  • A lire aussi sur le même sujet "Présent" de Jeanne Benameur (voir le commentaire sur le blog "A l'ombre du cerisier")

  • "Charité bien ordonnée commence par soi-même" dixit François Bégaudeau ce soir .
    Quel culot!!
    Comment reprocher à son interlocuteur de ne pas connaître les sujets qu'il traite dans ses ouvrages alors que lui-même visiblement n'a pas du enseigner très longtemps et encore moins longtemps en banlieue!!!(d'ailleurs le 19 éme fait-il partie de la banlieue? - pour Bégaudeau sans doute -)

    Quand les émissions de télévision, vont-elles enfin nous présenter de VRAIS professeurs qui se consacrent entièrement à leur mission, sans avoir aucun ouvrage à vendre, et non pas des imposteurs qui pour assurer leur promo se transforment en bonimenteurs?


    Alors un VRAI prof de banlieue (6 ans déjà à Sarcelles et le même âge que F.B) vous aurait dit, sans langue de bois ( Merci Monsieur Finkielkraut! )
    - Oui, les élèves qui travaillent sont traités de "bouffons" voir de "bâtards" par ceux dont "l'énergie vitale " est célébrée par F.Bégaudeau et soutenir le contraire serait malhonnête ou alors ignorer ce que peut être la population scolaire des banlieues.

    -Oui, il existe bien un racisme intercommunautaire (les "rebeus "contre les "renois") et un antisémitisme flagrant et tout prof ayant abordé les thèmes de la religion et de la laïcité en classe, ne le sait que trop.

    -Oui, l'école doit être un lieu de patience et de labeur et redonner le goût de l'effort aux élèves.

    Il est, de notre devoir d'adultes et d'enseignants, de ne pas cautionner les théories démagogiques, écoeurantes, soutenues par F.B selon lesquelles, tout ce qui vient de la banlieue, même si cela est destructeur, est fabuleusement "riche " car transcendé par une "énergie révolutionnaire".

    Non, F.B ne connaît pas la banlieue, d'ailleurs, comment pouvoir prétendre connaître ou aimer le métier d'enseignant quand on se met en disponibilité pour se consacrer à des activités bien plus lucratives telles que le cinéma,le journalisme et les débats de salon.

    Non, F.B n'aime pas la banlieue mais veut nous faire croire qu'il la "kiffe grave!" parcequ'aprés tout 100 000 exemplaires d'un bouquin çà fait quand même un paquet de thunes!

    Pour tout cela, le bouquin de Begaudeau est trés mignon mais c 'est un nonsense du point de vue de l'observation de l'éducation en banlieue.
    Il est trés penible de voir le metier que j'exerce avec passion dans des difficultés enormes réduit à un amas de glandus passant leur temps à se plaindre dans la salle des profs.
    Non, monsieur Begaudeau, un lycée de ZEP en banlieue parisienne ce n'est pas ça et heureusement d'ailleurs car ce serait assez navrant.
    Mais il est vrai que pour connaître réellement les problèmes des banlieues il faut peut etre déjà y vivre...

  • Ouf ! Je viens de lire tous les commentaires ! C’est riche et on sent la passion qui rode dessous...
    J’ai lu ce livre aussi et je l'ai trouvé intéressant, j'ai découvert une réalité de vie de classe que je ne soupçonnais pas. Mais j'ai trouvé le prof narrateur et la description des collègues navrants. Très désespéré, assez pour être désespérant. C'est finalement une bonne chose que ce monsieur fasse autre chose non ?

  • @ Sylvie : "C'est finalement une bonne chose que ce monsieur fasse autre chose non " : oui tu as raison ;-)

  • Je viens de terminer "entre les murs" et je pense que ce livre milite (involontairement) pour le vouvoiment au collège.

    Cette règle obligerait les professeurs à mettre une distance minimale entre eux et les élèves. Distance transgressée allègrement par François Begaudeau qui s'adresse aux collégiens dans le langage le plus cru. (ce qui n'offusque personne)
    exemple (p 249) (Begaudeau s'adresse à un de ses élèves qu'il a pris en grippe)
    -Tu sais pourquoi tu viens encore ? Tu viens parce que tu sais rien faire d'autre. Parce que sinon tu t'emmerdes .
    [...]
    - Et tu sais pourquoi tu t'emmerdes ? parce que ta vie c'est rien. Parce que t'as une pauvre vie.

    Qu'un professeur s'adresse de cette façon à ses élèves et qu'en plus il soit cité pour sa pédagogie dans les médias me laisse sans voix. L'élève en question a été mis dehors sans autre forme de procès. Pas de parents bourges pour le défendre. Personne pour le défendre.

    Qu'est-il devenu ? On n'en sait rien.

    Bravo M. Begaudeau, grâce à vous on comprend un peu mieux pourquoi certains élèves sont tentés de brûler leur école ... (ce qui est pourtant la plus triste des choses)

  • Si vous souhaitez mieux comprendre le décalage entre le langage courant des profs et l'incompréhension des élèves (c'est ce que j'appelle la fracture culturelle), ce lien :

    http://generation69.blogs.nouvelobs.com/.

  • @ daniel arnaud : cet article est en effet très intéressant ! Merci !

Les commentaires sont fermés.