En 1910, dans la nuit du 27 au 28 octobre, Tolstoï, qui a 82 ans, quitte la propriété familiale avec son secrétaire, sans prévenir sa femme ni ses enfants. Il prend un train, puis un autre, essayant de brouiller les pistes. Ses proches sont prévenus, certains viennent le retrouver et essaient de le convaincre de rentrer. Mais il repart jusqu'à Chamardino où habite sa soeur, puis reprend un train mais, fiévreux, doit s'arrêter dans la petite gare d'Astapovo où il mourra quelques jours plus tard.
Hasard de l'édition, après les derniers jours de Zweig, voilà ceux de Tolstoï. Pourtant il n'y a pas grand-chose de commun entre ces deux fins de vie. Tolstoï fuit sa propriété essentiellement pour des raisons familiales. Sa femme, avec laquelle il est mariée depuis presque 50 ans, est très instable psychologiquement et lui fait de nombreuses scènes. Certains de ses proches la soutiennent, d'autres au contraire sont du côté de Tolstoï. Celui-ci cherche un peu de paix, un peu de calme pour continuer à écrire.
Le travail de recherche de Cavallari a été facilité par la quantité de sources parlant de cet épisode. Il faut dire qu'à cette époque en Russie tout le monde écrivait, tout le temps ! Chacun tenait son journal intime, les gens s'envoyaient des lettres, des télégrammes. Pendant ces quelques jours, je n'ai pas compté combien de courriers ont été échangés, mais c'est assez impressionnant. Et on peut ajouter les témoignages écrits des personnes qui ont reconnu Tolstoï ainsi que les articles des journaux locaux qui mentionnent son passage. Inutile de dire qu'il n'a pas réussi à garder longtemps son incognito !
J'ai trouvé vraiment très intéressante cette plongée dans l'intimité de Tolstoï pendant quelques jours. On suit ses réflexions, son travail, ses inspirations, ses tiraillements entre la vie confortable et la vie austère qui l'attire...Il ne faudrait pas me pousser beaucoup pour que je me replonge dans Anna Karenine ou Guerre et paix...
En cette année de centenaire de sa mort, de nombreuses publications sont prévues.