Vous allez être nombreux, je suppose, à aller voir l'adaptation de la BD "Persepolis" de Marjane Satrapi en film d'animation, et vous aurez raison car c'est vraiment une petite merveille.
L'histoire de cette petite fille qui a huit ans quand le gouvernement du Shah tombe et est remplacé par la république islamique, est tour à tour touchante, tragique (magnifique évocation des milliers de morts pendant la guerre Iran-Irak), désopilante (elle n'a pas sa langue dans sa poche, le petite Marjane) et à jamais inoubliable. Sa jeunesse brimée par les injonctions des islamistes, puis perdue dans l'Autriche des années quatre-vingt où elle a bien du mal à trouver sa place nous rendent cette jeune fille infiniment sympathique. La grand-mère (c'est d'elle que Marjane tient sa langue bien pendue..) est incarnée avec justesse par la voix de Danielle Darrieux.
Le graphisme est rendu très vivant par les effets d'animation, et la noirceur du trait est atténué par les modulations que permet la technique.
Un film d'animation à voir absolument par les jeunes et les adultes, et par les amateurs de BD mais aussi par les autres.
Cinéma - Page 5
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Persepolis (de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud, avec les voix de Chiara Mastroianni, Catherine Deneuve, Danielle Darrieux)
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Dialogue avec mon jardinier (de Jean Becker, avec Daniel Auteuil et Jean-Pierre Darroussin)
Un peintre parisien quinquagénaire, Daniel Auteuil, revient dans la maison de son enfance, en province. Pour s'occuper du terrain en friche, il passe une annonce pour trouver un jardinier. Le hasard fait qu'il s'agit d'un ancien camarade d'école primaire, Jean-Pierre Darroussin. Ils sont heureux de se retrouver mais à mille lieux l'un de l'autre ! Auteuil est préoccupé par son art et ses modèles féminins alors que Darroussin a les pieds bien sur terre et prend à coeur son rôle de jardinier. Ils se côtoient et peu à peu s'instaure un dialogue entre le provincial-cheminot en retraite et le parisien-artiste, et même une amitié. La franchise et la simplicité avec lesquelles Darroussin voit le monde amusent d'abord Auteuil, puis le font réfléchir sur le sens réel de sa vie à lui.
Un peu réticente à l'idée d'aller voir ce film, je dois dire que je ne me suis pas ennuyée. Comme mon résumé ne le dit pas forcément, c'est d'abord une comédie. On rit beaucoup dans ce film. Darroussin est très à son aise et exprime bien la bonhomie et le bon sens que l'on prête aux gens simples, et Auteuil, peut-être moins convaincant, nous fait rire avec ses allures d'artiste qui s'interroge ! Certes le tout est un peu caricatural ( le sage provincial et le parisien qui a tout à apprendre ) et il ne faut pas chercher de messages dans ce qui n'est qu'un prétexte pour mettre en valeur deux excellents comédiens. Comme le dit BMR, "frais et sans prétention" ! Et l'avis de Philippe.
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Still life (de Jia Zhang Ke, avec Han Sanming, Zhao Tao, Huang Yong )
San Ming fait un voyage de plusieurs jours en bateau pour rejoindre la ville de Fengje. Il a pour toute adresse quelques lignes sur un petit morceau de carton. Mais en arrivant il se rend compte que la rue qu'il cherchait a été engloutie, comme une grande partie de la ville, sous les eaux du barrage des Trois Gorges. Des populations entières doivent quitter leur maison car le barrage doit encore s'étendre. Logé de façon sommaire, il trouve un travail comme démolisseur. Ce qu'il cherche : son ex-femme et surtout sa fille qu'il n'a pas vu depuis seize ans.... Parrallèlement Shen Hong vient à Fengje voir son mari qui l'a quittée depuis deux ans.
Que l'on ne se trompe pas, ces deux histoires ne se rejoindront pas. Ici pas d'histoire convenue avec happy end obligée. Pas de drame non plus. C'est la vie la plus quotidienne qui est filmée magnifiquement par le réalisateur. Les contrastes entre le gigantisme des travaux entrepris et la vie des individus sont frappants. Le côté documentaire (car il y a aussi cet aspect) ne gomme jamais l'humanité avec lequel chaque personnage est filmé. Le rythme lent n'est jamais pesant. Le commentaire de mon mari à la sortie : "Ca, c'est du cinéma !".
Ce film a obtenu le Lion d'Or à la dernière Mostra de Venise.
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Anna M. (réalisé par Michel Spinosa, avec Isabelle Carré et Gilbert Melki)
Anna est relieuse à la BNF, elle vit seule avec sa mère, émigrée russe, et son chien. A la suite d'un accident qu'elle provoque, elle est hospitalisée et tombe amoureuse de son médecin, ou plutôt elle est persuadée que celui-ci est tombé amoureux d'elle. Elle commence alors à le harceler : elle le suit, lui téléphone, lui offre des cadeaux, lui écrit. Mais peu à peu cette obsession devient maladive. Elle simule un accident pour porter plainte contre lui, réussit à s'engager comme baby-sitter dans l'appartement voisin pour l'espionner.... La tension monte et le spectateur se demande jusqu'où va aller cette folie....
Autant le dire tout de suite, je l'ai pas du tout été sensible à cette histoire qui oscille entre drame psychologique et thriller. Malgré l'excellent jeu d'Isabelle Carré (elle atteint vraiment les sommets d'Isabelle Huppert ou Isabelle Adjani dans ce genre de film), le scénario est trop bancal pour être plausible. Le médecin proteste mollement contre ce harcèlement ; malgré des preuves flagrantes de folie, Anna n'est pas inquiétée ; même une fois internée, elle est rapidement relâchée ; les scènes les plus éprouvantes (sirop rouge versé dans le lit, enfants maltraités) sont caricaturales. Bref je n'ai pas trouvé ce film sans intérêt mais je l'ai trouvé pesant et mettant mal à l'aise sans pour autant faire passer une angoisse qui aurait pu être hitchcockienne.
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Nue propriété (réalisé par Joachim Lafosse, avec Isabelle Huppert, Jérémie Renier, Yannick Renier)
Dans une belle propriété au coeur de la Belgique, une femme vit seule avec ses deux grands fils jumeaux. Désireuse de changer de vie et influencée par le séduisant voisin, elle envisage de vendre la maison. Les réactions des garçons sont très différentes. Alors que l'un comprend sa mère, l'autre ne peut envisager de quitter cette maison et il a des réactions extrêmement violentes. De fait, arrivés à l'âge adulte, ils doivent tous deux penser à quitter la cellule familiale, mais leurs sentiments sont si différents qu'elle entraîne une véritable guerre entre les deux frères.
Filmé de manière très artisanale avec une seule caméra, sans musique et sans effets spéciaux, ce film tient tout entier grâce au jeu des acteurs. Isabelle Huppert en mère passionnée est extraordinaire, et les frères Rénier (frères dans la vie et dans le film) sont excellents. Certes le film est parfois un peu maladroit, le procédé technique parait parfois trop systématique, mais l'impression général qui en ressort est celle d'une extrême violence dans la famille et d'un trop plein d'émotions difficiles à exprimer et encore moins à canaliser. A conseiller aux amateurs de névroses familiales (j'aime bien, moi ;-) ), quant aux autres...
L'avis d'Amandine
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Ne touchez pas la hache (réalisé par Jacques Rivette, avec Jeanne Balibar, Guillaume Depardieu, Bulle Ogier, Michel Piccoli...)
Tiré de la nouvelle de Balzac "La Duchesse de Langeais", ce film, très fidèle, au texte, décortique les atermoiements amoureux entre une homme et une femme.
Armand de Montriveau, général bonapartiste, tombe follement amoureux de la duchesse de Langeais, coquette parisienne. Celle-ci le fait languir, souffle le chaud et le froid, bref ne se donne jamais à lui. Montriveau décide alors de l'ignorer et de se venger. Ce n'est que là, sentant le général lui échapper, que la duchesse va se dévoiler.
Le film débute cinq ans plus tard, dans le couvent d'une île espagnole...
Ceux qui ont lu la nouvelle de Balzac connaissent à la fois l'histoire et le talent de l'écrivain pour exprimer précisément les tourments des âmes amoureuses. Rivette rend magnifiquement cette atmosphère en prenant son temps, en proposant bien sûr des décors magnifiques et bien éclairés, et surtout en dirigeant magistralement l'excellent Guillaume Depardieu (parfait dans ce rôle) et l'étonnante Jeanne Balibar. Certes le rythme est lent mais il s'accorde avec le temps du désir qui n'est pas le même selon qu'il s'agit de celui du fougueux général ou celui de la coquette duchesse. Vraiment j'ai trouvé ce film magnifique, il dure plus de deux heures mais je serai volontiers restée encore avec ces personnages balzaciens que, c'est vrai, j'aime particulièrement !
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J'attends quelqu'un (Réalisé par Jérôme Bonnell, avec Jean-Pierre Darroussin, Emmanuelle Devos, Eric Caravaca)
Une petite ville de province. Père divorcé, patron de café, Louis retrouve souvent Sabine à l'hôtel. Il la paie pour cela mais leurs relations vont au-delà... Pourtant se comprennent-ils réellement tous les deux ? Sa soeur, Agnès, est mariée à Jean-Philippe, un journaliste charmant mais un peu névrosé. Un jour elle revoie Stéphane, un jeune homme qu'elle a connu enfant. Mais Stéphane porte un lourd secret...
Ce film, tout en demi-teintes, nous propose des scènes de la vie quotidienne où se croisent ces personnages. Peu d'action, mais plutôt des émotions qui transparaissent chez les personnages au fur et à mesure des rencontres. Les comédiens sont excellents, notamment Daroussin dans le rôle du patron de café mélancolique. Un joli film dont on ressort un peu rêveur... Mais c'est le genre de film que j'aime bien, à l'opposé du bruit que l'on entendait dans la salle d'à côté où passait 300 !
L'avis de Philippe. -
Les témoins (d'André Téchiné, avec Emmanuelle Béart, Michel Blanc, Sami Bouajila, Johan Libéreau, Julie Depardieu)
J'emprunte à Amandine le début de son résumé : Paris, été 1984. Manu débarque à Paris, où il partage la chambre de sa soeur Julie dans un hôtel modeste. Il fera la connaissance d'Adrien et nouera une amitié chaste et joyeuse avec ce médecin quinquagénaire, qui lui fera découvrir le style de vie de son milieu. Parallèlement il profite pleinement de la liberté que lui offre le Paris homo d'alors. Une rencontre pourtant, avec un homme marié (ou presque) va tout changer. Mais nous sommes au début des années 80 et le SIDA fait son apparition; C'est le début des années noires, les traitements lourds et vains....
Je dois dire que, malgré la pléiade d'excellents acteurs qui jouent dans ce film, je n'ai pas été très sensible à cette histoire. Rien à voir avec "Les nuits fauves". Ici c'est plutôt une chronique de ces années dans un milieu parisien très aisé. Même les différentes histoires d'amour ne m'ont pas convaincue. Je ne me suis pas franchement ennuyée (encore que.... c'est bien long...) mais je ne retiens aucune image marquante de ce film.
L'avis plus positif de Lo.
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Les Climats (Réalisé par Nuri Bilge Ceylan)
Le couple et la difficulté de le faire durer, voilà un thème universel ! Dans ce très beau film, le réalisateur montre deux êtres qui ne s'aiment plus comme avant mais qui, peut-être, s'aiment encore. Toute la subtilité des sentiments est évoquée grâce à une très belle prise de vues, aux portraits, aux paysages, au temps qui passe à travers les saisons....
Chez ces intellectuels turcs, les vacances d'été seront fatales à leur couple. A Istanbul, au retour, la vie quotidienne reprend, chacun de leur côté. Bien que ce soit l'homme qui ait proposé la séparation, il semble le plus malheureux. Jusqu'où ira-t-il pour la revoir ? Et, dans cet hiver russe (superbes images sous la neige) , que cherchera-t-il exactement ? Difficile de résumer ce film où tout est évoqué sans être vraiment dit.
Sans avoir eu le coup de foudre, j'ai pris beaucoup de plaisir à le voir et ne suis pas ennuyée malgré sa lenteur. En revanche mon mari a trouvé qu'il était très marqué "turc" (les rapports hommes-femmes notamment) et qu'il n'avait pas la portée universelle qu'il aurait pu atteindre. Je serais curieuse d'avoir un avis autre que celui de Télérama qui porte aux nues ce film !
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La vie des autres (Florian Henckel von Donnersmarck, avec Thomas Thieme, Martina Gedeck, Ulrich Mühe)
Je crois que les films que j'ai vus depuis le début de l'année vont passer au second plan maintenant que j'ai vu celui-là ! Il a déjà eu beaucoup de récompenses en Allemagne et en aura certainement d'autres.
L'histoire. En Allemagne de l'Est au début des années 80, un couple d'artistes (metteur en scène et actrice) est mis sur écoute et filmé par la Stasi. En effet, bien que fidèles au Parti, ils inspirent de la méfiance aux dirigeants. L'agent Wiesler, un homme du Parti particulièrement inflexible, est chargé de leur surveillance. Pendant des jours il les voit vivre, lire, échanger, rencontrer d'autres artistes, s'aimer.... Peu à peu il ne peut s'empêcher de s'attacher à ce couple.....
Ce film présente à la fois une intrigue romanesque prenante, une réflexion sur l'artiste et la politique, et un retour dans le Berlin communiste. Dans une interview dans Télérama, le réalisateur dit qu'il trouvait que l'on avait une visions assez positive, voire même assez drôle, de l'Allemagne de l'Est à travers "Good-bye Lenin" et il souhaitait revenir sur cette période. Il le fait magnifiquement ! Les prises de vue sont soignées, les extérieurs très bien rendus dans des couleurs froides et les intérieurs bien filmés avec au contraire beaucoup de chaleur. Les comédiens sont excellents, notamment Wiesler (Ulrich Mühe). Vraiment c'est un film magnifique que je conseille à tous et toutes d'aller voir !