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  • La bonne. - Isabel Marie (Grasset, 1996)

    Quelle drôle d’histoire que celle racontée dans ce roman. L’impression de malaise que j’ai ressentie à sa lecture ne s’est pas encore dissipée !

    La narratrice, Sarah fait des études de philo mais, ayant raté l’agrégation, et ne souhaitant de toutes façons pas enseigner, choisit de devenir employée de maison. Pour elle, accomplir les tâches ménagères est une activité répétitive qui permet d’occuper le corps en laissant l’esprit libre. Comme lieu de travail elle choisit une grande et belle maison habitée par un homme très occupé et une femme névrosée et obsessionnelle. Logée sur place, elle épouse les habitudes du couple. Au fil des semaines, elle devient la confidente de la femme et se rend indispensable au couple . Peu à peu la situation évolue et on se rend compte qu’elle acquiert la maîtrise du foyer en manipulant l’un et l’autre. En libérant la femme de ses obsessions et de ses phobies, elle l’éloigne de son mari et prend sa place. Elle tire les ficelles de cette situation avec un parfait sang-froid jusqu’à la fin, un peu décevante toutefois.

    Ce livre est visiblement assez autobiographique. En tout cas il doit reprendre un certain nombre d’obsessions et de fantasmes de l’auteur qui s’est suicidée peu de temps après avoir écrit son livre suivant, "La malle" (heu… j’hésite à le lire…).

  • A la croisée des mondes, tome 3 : le miroir d'ambre. - Philip Pullman (Gallimard, 2001)

    Lyra est retenue prisonnière par Madame Coultier et Will, aidé par différents amis, va devoir la délivrer. Mais une fois libre, Lyra est persuadée qu'elle a une mission à accomplir : aller au Royaume des Morts pour voir une dernière fois son ami d'enfance, Roger. Mais l'étau se resserre autour de Lyra. Le but de "l'Autorité" est d'éradiquer le péché originel et son objectif immédiat est de supprimer Lyra, nouvelle Eve, avant qu'elle succombe à la tentation…

    Attention, pas de happy-end à cette histoire qui est un vrai conte philosophique. Philip Pullman est un extraordinaire conteur d'histoires et il nous tient en haleine dans cette quête désespérée. Comme l'a bien écrit HollyG, les références bibliques et philosophiques sont nombreuses et l'histoire va bien au-delà d'une simple histoire fantastique.
    Ces livres ont eu la malchance de sortir en France en même temps qu'Harry Potter et d'être éclipsés par le succès du jeune sorcier. J'ai eu beaucoup de plaisir à lire les Harry Potter, mais "A la croisée des mondes" est vraiment un cran au-dessus ! Je le comparerais plutôt au "Seigneur des Anneaux" par la création d'un monde en soi et la recherche d'un paradis perdu. Si Peter Jackson manque d'idée, il pourrait peut-être penser à adapter Pullman au cinéma…

  • A la croisée des mondes, tome 2 : la tour des anges. - Philip Pullman (Gallimard, 1998)

    Dans ce deuxième volume de "A la croisée des mondes", nous retrouvons Lyra qui est arrivée dans un de ces mystérieux mondes parallèles où les humains n'ont pas de daemon. Elle y rencontre Will qui est à la recherche de son père, disparu dans une expédition dans les pays du Nord. Le monde où ils sont arrivés a été vidé de ses adultes par les mystérieux Spectres, et les enfants, laissés à eux-mêmes, n'ont qu'une peur, devenir adulte et se faire happer par les Spectres. La seule arme contre ses mystérieux ennemis est un couteau, convoité par beaucoup de monde…

    Le rythme de ce deuxième volume est aussi enlevé que dans le premier. Les mondes dans lesquels évoluent Lyra et Will ne sont pas très éloignés du nôtre, et la quête qu'ils poursuivent tous les deux nous semble bien proche. Cette fois encore, malgré la dureté de certaines scènes, l'innocence triomphera face à l'avidité et la haine, mais il n'y pas trop de manichéisme non plus, et on sent que l'équilibre entre le Bien et le Mal est toujours très instable.

  • A la croisée des mondes, tome 1 : les royaumes du nord; - Philip Pullman (Gallimard, 1998)

    Lyra vit dans un collège d'Oxford une existence un peu trop monotone pour son tempérament impétueux. Heureusement son oncle, qui arrive d'une mystérieuse expédition dans les pays nordiques, lui propose de partir à Londres avec Madame Coulter, une de ses consœurs. Mais les sujets d'étude évoqués par son oncle et Madame Coulter enflamment l'imagination de Lyra. Des enfants seraient kidnappés par des Enfourneurs. Des hommes étudieraient une mystérieuse Poussière et laisseraient entendre que d'autres mondes existent… Après avoir compris que cette madame Coulter avait à voir avec les Enfourneurs, Lyra s'enfuit et essaie de rejoindre son oncle dans le Grand Nord. Elle devra se faire aider des tsiganes, de l'ours en armure Iorek et des sorcières pour combattre tous ceux qui en veulent aux enfants en général, et à elle en particulier.

    Heureusement, pour la soutenir elle a son daemon, Pantalaimon (un daemon… c'est une sorte de petit animal inséparable de son humain, une sorte "d'âme extérieure"…) et pour l'aider un aléthiomètre, mystérieux appareil qui aide à connaître la vérité. On m'avait beaucoup parlé de cette trilogie et je dois dire que le premier volume tient ses promesses. Dès le début on est emporté par la vivacité des personnages et par l'imagination débordante de l'auteur qui nous emmène toujours plus loin. Quant à Lyra, on est vite séduit par cette petite fille qui, comme Ulysse, réussit par la ruse ce qu'elle ne peut pas faire par la force !

  • Une sale histoire. - Luis Sepulveda (Métailié, 2005)

    Sepulveda est l’auteur du merveilleux " Le vieux qui lisait des romans d’amour" et d’autres romans qui se passent en Amérique du Sud. On sait moins que c’est un auteur très engagé politiquement qui s’est toujours battu contre toutes les oppressions, l’injustice et l’intolérance.

    Ce livre rassemble une soixantaine de petites chroniques qu’il a écrites ces dernières années. Elles retracent à la fois des jugements sur la vie politique internationale (l’ONU, l’Uruguay, l’Irak, Bush, encore Bush…), des évocations d’écrivains amis morts récemment (Coloane, Montalban) et des épisodes de son enfance. Les chroniques les plus drôles sont aussi les plus touchantes : il récupère un chien abandonné par son maître, suit ce dernier sur l’autoroute jusqu’à ce qu’il s’arrête, puis lui rend le chien (toujours le souci de la justice) ; il photographie des annonces dans des vitrines, "Nous donnons des explications", "On prend les mesures"…et entre dans les boutiques en prenant ces annonces au pied de la lettre ! ; il sympathise avec un Père Noël anti-Sharon, etc.

    La variété de ces chroniques est telle que l’on ne s’ennuie pas une minute en les lisant, on les dévore même comme si c’était un roman ! Quelle formidable leçon de vie, de tolérance et d’indignation face à toutes les injustices et à toutes les bassesses !

  • Le coeur à la craie. - Daniel Picouly (Grasset, 2005)

    La banlieue parisienne dans les années cinquante. Bonbec et son ami, les deux héros du "Champ de personne", reviennent nous raconter leur vie d'enfants de neuf ans. Le fil du récit, ici, c'est "les filles" ! En effet Bonbec a une "poule" et pas le narrateur ! Il rêve d'avoir un coup de foudre, un vrai, et il essaie aussi souvent qu'il peut, d'aider le destin. Pourtant il est entouré de filles, les voisines, les copines de classe… Mais ce n'est pas facile le coup de foudre réciproque !

    Comme dans "Le champ de personne", Daniel Picouly nous fait tout de suite entrer dans ce roman très inspiré de sa vie personnelle. Le ton est juste, drôle, jamais outré, souvent touchant. Et même si les enfants d'aujourd'hui sont plus souvent devant des écrans que dans des cabanes ou sur des arbres, et même si les "poules" s'appellent maintenant des "meufs", les sentiments restent les mêmes.

  • La station Saint-Martin est fermée au public. - Joseph Bialot (Fayard, 2004)

    Découvert moribond sur une route allemande en 1945, un homme est ramassé par les soldats américains. Il est amnésique, et la seule trace l’identifiant est un tatouage fait à Auschwitz. Pendant des semaines il réapprendra peu à peu à s’alimenter, à ne plus être terrorisé. En revanche il lui faudra l’aide d’un narcotique pour que des images de son passé lui reviennent en mémoire. Son arrestation, les convois en train, les camps… Mais ce n’est qu’à Paris, en parcourant inlassablement les rues, qu’il parviendra à reconnaître des détails familiers, des magasins, sa station de métro (fermée au public depuis 1939) et, enfin, sa maison.

    Tiré d’un fait réel, ce très beau récit est dans la lignée de "C’est en hiver que les jours rallongent". De nouveau l’inimaginable nous est décrit, cette fois par bouffées au fur et à mesure que les souvenirs reviennent. Le retour à Paris des prisonniers et des rapatriés des camps est aussi un moment très fort. Difficile d’en dire davantage tant l’émotion est palpable face à de tels récits.

  • C'est en hiver que les jours rallongent. - Joseph Bialot (Seuil, 2002)

    Hasard des lectures, je prends ce livre juste après avoir lu celui de Marie Chaix sur son père collabo ! Même époque mais changement d’ambiance. Là où certains profitaient au maximum de la situation politique, c’est la déportation pour des millions d’autres.

    Il est toujours difficile de faire un compte-rendu des livres sur les camps de concentration. Quand on a lu Primo Levi, on "sait". Ce que Bialot nous décrit, on le "reconnaît". Et pourtant c’est unique parce que c’est son histoire, son arrestation, son arrivée à Auschwitz, son expérience de l’entraide, de la traitrise, de la souffrance, de la mort, de l’inhumain surtout, puis la libération des camps et le retour en France.

    Joseph Bialot est surtout connu comme auteur de romans policiers (une vingtaine). Il a attendu plus de cinquante ans avant de pouvoir témoigner sur cette période et son livre se termine sur un hommage à tous ceux qui n’ont pas réussi à "re-vivre" au retour des camps et se sont donnés cette mort qu’ils avaient évitée au Lager. Parmi les plus connus, Primo Levi, Bruno Bettelheim, la mère de Art Spiegelman, mais aussi tous les autres.

  • Les rues de ma vie. - Bernard Frank (Le Dilettante, 2005)

    De la rue Chaptal à la rue Martignac, de Sagan à Chardonne, et du Grand Véfour au Pied de Cochon, c’est à une promenade dans son existence tout entière que nous convie Bernard Frank. Promeneur amoureux de Paris, tel Léo Malet ou Patrick Modiano, il nous entraîne dans ses errances, d’appartement en maison, de café en restaurant et de célébrités littéraires en journalistes.

    D’une intelligence brillante, jamais pédant, Bernard Frank est un véritable mémorialiste du 20e siècle et un vrai "dilettante" (comme son éditeur) : "personne qui ne se fie qu’aux impulsions de ses goûts". Un petit bijou de livre à offrir à tous les amoureux de Paris…et de bonnes tables parisiennes.

  • L'étourdissement. - Joël Egloff (Buchet-Chastel, 2005)

    Joël Egloff nous propose ici une histoire sans lieu ni date avec un héros sans nom. Son monde, l'abattoir où il travaille dur, la maison malmenée par les lignes à haute tension et les vibrations des avions qui décollent, la fumée des usines, la décharge... Le week-end on va pêcher dans la rivière polluée ou ramasser des objets abandonnés dans la forêt. Pourtant le narrateur ne s'apitoie pas sur lui-même. La quatrième de couverture parle d'humour et de poésie. C'est vrai que le désespoir est masqué par l'extraordinaire vitalité des personnages qui, c'est sûr, rêvent de partir ailleurs, mais sont quand même attachés à cet horizon fermé qui est le leur.

    L'atmosphère m'a fait penser aux romans de Mingarelli (d'ailleurs je viens de lire dans une interview qu'Egloff et Mingarelli se connaissaient bien). Ici les personnages sont plus volubiles, mais on les sent habités par un même poids du destin qui fait que, quoi qu'il arrive, ils doivent subir leur vie plutôt que la diriger. "C'est pas une vie" dit le narrateur à son ami, "C'est la nôtre pourtant" ! Beckett et Céline ne sont pas loin...