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  • Les derniers jours d'un homme. - Pascal Dessaint (Rivages, 2010)

    derniers jours.jpgNoyelles Godault dans le Pas-de-Calais, siège de l'usine Metaleurop, usine métallurgique qui transformait des métaux lourds. Ses activités ont été à l'origine de pollutions chroniques par le plomb. En 2003 l'usine ferme, mettant 830 ouvriers au chômage.

    Dans ce récit, Judith, dix-huit ans, essaie de mieux connaître son père, mort alors qu'elle avait cinq ans. Dans ce village qui ne vit que grâce à l'usine, c'est aussi à cause d'elle que les enfants ont un taux inquiétant de plomb dans le sang, que les ouvriers ont des cancers foudroyants et qu'il est interdit de manger des légumes du jardin et de jouer dehors. Là-bas la fumée de plomb est un poison. Et pourtant c'est leur gagne-pain, et quand quelqu'un essaie de monter un comité pour porter plainte contre l'usine, tout le monde réagit violemment. Le père de Judith essaie de s'interposer. Treize ans après Judith veut comprendre la vie d'alors, quand il y avait encore l'usine et quand son père était vivant.

    J'avais repéré ce livre depuis longtemps d'après d'excellents billets et, je confirme, ce roman est d'une force inouïe avec une histoire que l'on n'est pas prêt d'oublier : le quotidien des ouvriers avec cette usine qui leur assure certes leur quotidien mais qui les rend malades ou qui les tue quand il y a un accident, et il y en a souvent. L'horizon se ferme quand l'usine s'arrête et avec elle les seuls emplois du coin. Pascal Dessaint mêle la dimension sociale à la dimension intime de ces vies comme les autres, et cela donne un récit poignant et douloureux. C'est un bel hommage à l'histoire de cette usine et de ses ouvriers et plus largement aux ouvriers victimes des fermetures d'usine.

    Les avis de ClaraCathulu, Cune

     

  • Le quatrième mur. - Sorj Chalandon (Grasset, 2013)

    chalandon.jpgTout commence par l'amitié entre un étudiant parisien, Georges, et un jeune Grec, Sam, metteur en scène, venu se réfugier en France. Nous sommes en 1974 et le Moyen-Orient connait des heures sanglantes. Au Liban la guerre va se déclencher et va bouleverser les Européens. Sam, en pacifiste convaincu, veut monter une opération incroyable. Il veut mettre en scène l'Antigone d'Anouilh à Beyrouth avec des acteurs venant de chaque camp. Un défi à la situation et une porte ouverte sur l'espoir d'une réconciliation. Mais Sam tombe malade et il fait promettre à Georges de poursuivre ce projet. Georges accepte mais quand il va à Beyrouth en 1982 l'intervention israélienne fait monter de plusieurs crans la violence, la mort est partout, le projet théâtral, pourtant bien démarré, semble bien dérisoire, et Georges reviendra en France anéanti par la sauvagerie des agressions qu'il a vu de ses propres yeux dans les différents camps.

    Quel livre fort et douloureux et quel talent d'avoir réussi à mettre des mots sur cette violence. Il aura fallu trente ans à l'auteur, grand reporter à l'époque au Liban, pour écrire sur ce sujet. La force vient aussi de la construction du livre qui commence doucement avec cette amitié entre les deux hommes, leurs discussions sur le théâtre, le projet de monter une pièce, et l'escalade de la situation. Un livre que l'on n'oubliera pas.

    L'avis de Clara , d'Anne-Sophie  

  • Un printemps à Tchernobyl. - Emmanuel Lepage (Futuropolis, 2012)

    lepage.jpgVingt-deux ans après la catastrophe de Tchernobyl, deux dessinateurs de bande dessinée se rendent là-bas. Pour eux c'est important que les artistes soient aussi présents sur les lieux de ce drame et témoignent, à leur manière. Le rappel des faits est terrifiant et les auteurs sont très inquiets avant d'arriver là-bas : les morts, les irradiés, les malades, la radioactivité toujours présente, le danger d'aller dans la zone interdite. Mais les populations se sont réinstallées dans les zones proches, elles refont leur vie malgré et parfois grâce à cette proximité. Et la nature peu à peu envahit tous les lieux de la zone interdite. Les auteurs sont pris dans cette contradiction : ils veulent témoigner des conséquences de cette catastrophe, mais surlepage2.jpg place les habitants sont chaleureux, heureux de vivre, confiants dans l'avenir et la nature offre des couleurs magnifiques. 

    Voilà un magnifique album autant pour le dessin que pour le scenario. Les auteurs réussissent à montrer la complexité de la situation avec un danger latent mais la vie qui reprend ses droits. Et le dessin, gris et sépia, prend peu à peu des couleurs. La construction avec des grands panoramiques mais aussi des petites cases nous fait cheminer avec les auteurs dans leur découverte. Cet album m'a rappelé le livre, inoubliable lui aussi, d'Antoine Choplin, La nuit tombée, sur le même sujet.

     

    L'avis de Noukette, Elodie, Hélène, Mango

     

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  • Au revoir là-haut . - Pierre Lemaitre (Albin Michel, 2013)

    au revoir la haut.jpgLes derniers jours de la première guerre sur le front de l'Est. Alors que les rumeurs sur la fin de la guerre s'amplifient, un lieutenant qui souhaite gagner des galons envoie ses hommes essayer de récupérer cette dangereuse côte 113. Une fois que les deux soldats envoyés en éclaireurs sont tués, tous les hommes le suivent, pourtant deux d'entre eux se posent des questions. Albert quand il voit que les deux hommes ont reçu des balles dans le dos. Edouard quand il s'étonne que le lieutenant d'Aulnay-Pradelle reste calme et regarde lentement ce qui se passe par terre au lieu de mener l'assaut. Albert manque d'y perdre sa vie et Edouard la sienne pour sauver Albert. Les deux hommes seront inséparables, pendant la démobilisation puis à leur retour à Paris. Comment vont-ils s'en sortir dans ce pays qui n'a pas les moyens d'indemniser ses poilus, qui a un lobby très fort d'anciens combattants, et qui a aussi un certain nombre d'arrivistes qui vont essayer de s'enrichir dans cette période agitée !

    Tous les billets sur ce livre sont très positifs et je vais continuer sur cette lancée. Les cent premières pages de combat sur le front sont époustouflantes, et pourtant il y a eu beaucoup de littérature sur les tranchées. La suite avec les passages sur l'hôpital, les gueules cassées et la démobilisation est aussi excellente. La partie du retour à Paris a un peu de mal à trouver son rythme mais ensuite tout s'enchaîne avec brio : la description de cette société où cohabitent les vieux politicards influents, les jeunes aux dents longues qui veulent se faire une place, et les poilus de retour à qui on ne propose rien et qu'on a de toute façon licenciés de leur travail. Chacun va essayer de s'en sortir avec plus ou moins d'honnêteté. Les magouilles sur l'identification des morts (sujet traité aussi dans La vie et rien d'autre de Tavernier), sur la grande opération de création de cimetières militaires, et sur l'édification de monuments aux morts montrent l'état de la France au sortir de la guerre. Bravo à l'auteur pour cette fresque riche, édifiante, cynique mais émouvante et très humaine !

     

    Les avis très positifs de Papillon, Sandrine, Clara, Cuné, DominiqueStephie, Ys, Keisha, Praline